Expérimenter et non produire
Scène de la vie quotidienne
Sophie, deux ans et demi est contente, elle est avec sa Nounou Adeline à l'atelier des nounous de l'association de quartier.
Elle joue dans la piscine à balles dont elle sort consciencieusement toute les balles une par un de la piscine.
Soudain Nounou Adeline vient chercher Sophie.
"Allez Sophie, on va faire du bricolage. Tu adores le bricolage".
Sophie ne veut pas aller faire du bricolage, elle préfère sortir les balles de la piscine. Mais l'heure c'est l'heure, Sophie et Nounou Adeline sont venues pour bricoler, il faut donc aller bricoler.
Il faut peindre des assiettes en carton en rouge pour faire des pommes, peindre un pince à linge en vert puis coller sur la pince du papier crépon découper en feuille et pincer la pince sur l'assiette.
"Quelle jolie pomme, nous allons faire" dit Nounou.
Sophie est installée à la petite table avec les copains, un pinceau à la main, elle voit la cupule de peinture verte y trempe son pinceau et barbouille la table devant elle.
Nounou Adeline la gronde et lui dit :
"Non pas la table, il faut peindre l'assiette en rouge, pas en vert".
Nounou Adeline tient fermement la main de Sophie et l'aide à peindre l'assiette en rouge.
Sophie a compris ce qu'on lui demande et elle barbouille joyeusement mais voilà que Nounou Adeline lui prend son assiette et lui donne un drôle d'objet en bois.
"On va peindre en vert" dit Nounou Adeline.
Sophie ne comprend pas, tout à l'heure elle voulait peindre en vert et Nounou Adeline lui interdit et maintenant elle lui demande de peindre en vert.
Bien évidement, Sophie n'arrive à peindre en vert la pince à linge qui est petite, elle donne des coups de pinceaux sur la table à côté.
Nounou Adeline lui prend le pinceau des mains et finit de peindre à sa place en marmonnant !
"Quelle maladroite !"
Au tour des feuilles maintenant, Nounou Adeline les découpe dans le crépon pour ne pas que Sophie se blesse avec les ciseaux pendant que Sophie se trémousse sur sa chaise.
"Tiens toi tranquille, Sophie".
Pour finir, il faut pincer le pince à linge à l'assiette, c'est trop dur pour la petite main de Sophie, heureusement encore une fois Nounou Adeline est là pour l'aider.
Ce soir à l'heure des mamans, Nounou Adeline sera très fière de montrer l'œuvre de Sophie à sa maman et sa maman ne comprendra pas pourquoi Sophie ne voudra pas l'emporter à la maison…
"Ce n'est pas moi qui l'ait fait " murmurera Sophie d'une toute petit voix mais sa maman ne l'écoutera pas et l'embrassera bien fort parce qu'elle a fait une bien jolie pomme.
Pitié, laissons les petits enfants expérimenter et non produire…
Apprendre par le "jeu"
Les séquences d'apprentissage de style scolaire sous forme d'ateliers directifs ne sont pas adaptées à l'apprentissage du tout-petit.
Le jeu, la libre exploration et la libre expérimentation sont les piliers de l'apprentissage du tout-petit.
La pédagogie par le jeu, en allemand "Spielpädagogik", est un terme apparu avec Friedrich Fröbel, pédagogue allemand du début du 19éme siècle à l'origine de la création des "jardins d'enfants".
Cependant, déjà au 17ème siécle, le philosophe anglais, John Locke, développait une théorie de la connaissance empirique. C'est à dire, que l'expérience est à l'origine de la connaissance et le fondement des apprentissages.
Un siècle plus tard, le philosophe français, Jean-Jacques Rousseau et Johann Heinrich Pestalozzi, suisse, pionnier de la "pédagogie moderne"
Ensuite, dans les années 1940 Emmi Pikler (Autriche puis Hongrie) et plus tard dans les années 1970 des Chercheurs du Michigan aux Etats Unis dans le cadre du programme "Hight scope perry preschool project" ont démontré que le tout petit s'éveille et apprend par l'expérimentation personnelle sans intervention active d'un tiers et par le jeu..
Le désir de découvrir, d'expérimenter, d'apprendre et de créer est intimement lié à la motivation et à la curiosité de l'enfant à découvrir le monde qui l'entoure.
L'enfant est le premier agent de son développement, il est le maître d'œuvre de son processus d'apprentissage et nous ne pouvons que l'accompagner, le sécuriser, lui donner confiance en lui-même et lui offrir un environnement qui l'incite à agir de manière autonome.
Le jeu constitue, bien plus que les animations, le travail en atelier ou en activités dirigées, un moyen privilégie d'interaction et d'évolution, de développement et d'apprentissage pour l'enfant.
- Rédigé par Magali
- 30/03/1999 date de première publication